Sur la longue route du retour de Bali (prolongée par les caprices d’un volcan), j’ai repensé à une multitude de petits instants que nous avions vécus au cours du voyage. Des capsules de souvenirs, des instants drôles, étonnants, précieux qui reflètent notre expérience de l’île et de ses habitants. Pour les figer dans ma mémoire, j’ai décidé de les écrire… puis de les partager ici pour vous donner une idée de l’ambiance toute particulière de ce petit bout d’Indonésie. Bon voyage !
« You have to take things slowly »
Milieu de l’après-midi caniculaire sur la Sunset Road, entre l’aéroport et Canggu, notre destination. Nous sommes réfugiés dans un mini-van climatisé au milieu des embouteillages. Autour de nous, tout est à l’arrêt, sauf les scooters qui zigzaguent entre les voitures, montent sur les trottoirs et se fraient un chemin vers leur destination.
Notre chauffeur, avec qui nous discutions encore quelques minutes plus tôt, semble pris d’une irrésistible torpeur. On avance au pas, on s’arrête, on reprend… La file semble infinie. « Is it always like that? » demande Karl. « Oh yes! In Bali, you have to take things sloooowly », sourit-il.
Nouvel arrêt. Cette fois notre chauffeur semble oublier de poser le pied sur le frein. Presqu’imperceptiblement, le mini-van recule doucement vers l’arrière. Jusqu’au dernier moment, je pense que notre chauffeur va réagir quand soudain : « BOUM! ». Notre mini-van a embouti la voiture de derrière. Coups de klaxon, notre chauffeur semble persuadé que c’est la voiture qui a avancé et non lui qui a reculé. Nous n’osons pas le contredire et poursuivons notre chemin.
Une dizaine de minutes plus tard, nous sommes dans une zone de travaux. Devant nous, le tarmac boursouflé forme une grosse bosse. Le véhicule devant nous s’immobilise alors que nous franchissons l’obstacle. Arrêt net suivi d’un brusque glissement vers l’arrière. Notre chauffeur a encore oublié les freins ! Cette fois le choc est plus violent et provoque un coup d’accélérateur paniqué de notre chauffeur, toutefois pas suffisant pour franchir la bosse. Nous repartons une seconde fois vers l’arrière et emboutissons de nouveau la camionnette. Son conducteur se présente à la fenêtre et, à renfort de grands gestes, somme notre chauffeur visiblement perturbé de s’arrêter, pendant que ce dernier continue de mettre les gaz pour franchir l’obstacle, sans succès. Karl évite de justesse une 3ème collision en tirant le frein à main.
Finalement, sur l’insistance du conducteur de la camionnette, notre chauffeur sort du mini-van, titube… et s’étale de tout son long sur la chaussée. Choqués, désorientés, nous ne savons pas quoi faire. Impossible de sortir du véhicule coincé au milieu des embouteillages. Des gens s’approchent pour porter assistance à notre chauffeur. Soudain, la portière s’ouvre et un jeune agent de sécurité entre. « Hello! I’m Rolly. It’s OK! Don’t worry my friends! Everything is going to be OK! Where are you going? »
Notre chauffeur visiblement sonné prend la place passager en répétant fiévreusement « Sorry boss, sorry boss! ». Nous lui assurons que tout va bien et nous inquiétons de son état. « I have big problems at home » nous confie-t-il. Nous n’en saurons pas plus.
Notre sauveur s’installe derrière le volant et entreprend de nous conduire à destination, en suivant les instructions du chauffeur. « First time in Bali? » nous demande-t-il en nous regardant dans le rétroviseur avec un sourire.
Money, money, money
Je regarde avec fascination la dame du bureau de change compter soigneusement devant moi les roupies indonésiennes auxquelles mes 200 € me donnent droit : « 700 000, 800 000, 900 000, 1 million… » En contemplant la liasse de billets qui grossit à vue d’oeil, je pense que c’est bien la première fois que je peux me dire millionaire ! Le compteur s’arrête à 2 998 000 et des poussières.
Bon d’accord, vivre à Bali en fait, c’est comme jouer au Monopoly.
Calmer les démons
Première balade sur la plage, au coucher du soleil. Le sable noir scintillant, clairement volcanique, est parsemé de petits paniers tressés, parfois garnis d’un bâton d’encens, de quelques biscuits, de riz ou de cigarettes. « C’est pour calmer les démons », m’explique Maëlle. « Pour les Indonésiens, ils viennent de la mer. » Plus tôt, elle m’a aussi expliqué que les portes d’entrée en bois si étroites que l’on voit partout ont pour vocation d’empêcher les démons d’entrer dans les habitations.
A Bali, l’île des Dieux, les démons sont partout.
Devant moi, une femme s’agenouille devant son offrande et murmure quelques mots, mains jointes devant son visage. Un rituel que nous verrons se répéter à l’infini tout au long de notre voyage.
Les chiens errants qui ont fait de la plage leur terrain de jeu profitent du festin. Maëlle ne laissent pas les siens en profiter « Parfois ils y mettent de la viande avariée. Cela n’a pas d’importance, les démons ne goûtent pas la différence. »
Première leçon de scooter
« Les flics ici, ils n’attendent qu’une chose : arrêter les touristes qui se déplacent en scooter pour leur soutirer un maximum de fric sous n’importe quel prétexte. Si tu ne portes pas de casque, ou si tu roules sans t-shirt comme les surfeurs australiens, tu peux être sûr qu’ils t’interpelleront.
Si ça arrive, fais comme si tu n’avais rien entendu et continue ta route si tu peux. S’ils t’arrêtent quand même, tu leur donnes 50 000 roupies*, tu dis que tu n’as que ça. Au mieux, tu prends 2 portefeuilles dans ton sac : un au cas où les flics t’arrêtent avec un minimum d’argent et aucune carte de crédit, l’autre avec le reste.
Ou alors, tu dis que tu n’as pas d’argent et que tu iras payer ton amende à Denpasar. Ils préféreront te laisser partir et trouver un autre pigeon. Mais surtout, surtout, si tu ne veux pas qu’ils t’arrêtent, tu ne les regardes pas ! S’ils croisent ton regard, c’est foutu. »
(* environ 3 €)
Le Bali d’avant
« Il fait tellement chaud ! C’est sans doute à cause du volcan ! » plaisante le monsieur qui vient de faire son entrée dans le petit resto d’Ubud où nous avons pris place pour midi. Cheveux gris attachés en queue de cheval, longue barbe blanche, regard perçant et vêtements colorés. Il a tout du hippie baroudeur qui a fait de Bali une seconde maison.
De fait : « C’est la 21ème fois que je viens ici », nous confie-t-il. « Je viens toujours à Ubud, toujours dans cette rue. Avant j’explorais mais plus maintenant… Ça a bien changé vous savez ! Il y a 45 ans, Bali, c’était pour les voyageurs hardcore ! Pas de route, pas d’électricité… même pas d’oeufs de poule ! On vous servait des oeufs de canard cuits dans l’huile. Il fallait avoir l’estomac sacrément solide ! »
A suivre dans un prochain article… N’hésitez pas à partager vos instantanés de Bali en commentaire !
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